MAUREGNY en HAYE et Les Cahiers d'Histoire

Géologie

 

Cendres noires et géologie



Le minerai appelé terre-houille au XVIIIe siècle est appelé lignite au XIXesiècle : il s'agit d'un charbon imparfait ayant la même origine que celui-ci. On découvrit de plus, dès le début, de nombreux végétaux fossilisés, des troncs d'arbres et notamment des palmiers dans les différentes cendrières. Cette ressemblance avec le charbon resta longtemps un sujet d'espoir et suscita des recherches pour trouver du charbon dans notre région. Depuis 1770, date à laquelle Belly de Bussy crut en avoir trouvé à Beaurieux6, nombre de sondages furent effectués, et particulièrement au XIXe siècle. Cet espoir subsistait encore en 1904 puisqu'on fit un sondage à Vailly jusqu'à 137 mètres de profondeur au moins7. Les recherches ont fait apparaître la présence de l'eau, elle-même liée à la présence de couches d'argile. On appela donc ces couches géologiques au XIXe siècle des «couches d'argile à lignite». C'est pourquoi, de nombreuses tuileries, poteries, briqueteries sont associées aux cendrières ou très proches d'elles. Enfin, on a découvert de nombreuses pyrites dans ce minerai et donc la présence de soufre et de fer, dès le XVIIIe siècle. Au XIXe siècle, on parle donc de «lignite pyriteux».

L'étude géologique de ces couches fut l'objet de très longs débats pendant une cinquantaine d'années dans les milieux spécialisés. Le comité français d'histoire de la géologie a consacré une partie de ses travaux à cette «dispute des lignites du Soissonnais» en 1983. Il nous apprend qu'il y eut une importante polémique au sein de la Société géologique de France de 1832 à 1838. Comme on trouve souvent le lignite au fond des vallées, on se demandait s'il s'agissait de dépôts modernes du type de la tourbe, comme dans la région de Beauvais, ou s'il s'agissait d'une couche géologique distincte. On s'interrogeait aussi beaucoup sur la manière dont cette couche avait pu se former à cause des caractéristiques de sa faune et de sa flore. Plusieurs géologues de l'Aisne participèrent à ces débats complexes. Ce fut d'abord Lemaistre, ingénieur des mines, neveu du chanoine Cotte de Laon, secrétaire de la Société royale d'Agriculture en 1788. Il fit une étude de la «tourbière» (cendrière) de Mauregny-en-Haye en 17878et une étude minéralogique du district de Laon en 1797. L'exabbé Poiret, professeur à l'Ecole centrale de Soissons pendant la Révolution, collaborateur de Lamarck, fit paraître un «mémoire sur la tourbe pyriteuse de l'Aisne» dans le Journal de physique de 1800 à

CENDRIERE Mauregny

1804 9. Ce fut enfin d'Archiac, auteur d'une importante Description géologique de l'Aisne en 1843, qui fit la synthèse de tous les éléments apparus dans ce débat, et le trancha définitivement sur la base d'un argument pratique. En effet, à Montaigu, on extrayait du lignite par galeries horizontales de 1 200 mètres sous le calcaire grossier des collines : il s'agissait bien d'une couche géologique ! Celle-ci est maintenant appelée Yprésien inférieur ou Sparnacien. La carte géologique moderne nous dit : «Cette assise est essentiellement composée d'argile plus ou moins plastique avec couches subordonnées de lignite pyriteux qui ont fait l'objet d'exploitations dans la première moitié du dernier siècle»

La géologie explique la disposition pratique des couches de lignite et donc les différents modes techniques d'exploitation. L'épaisseur moyenne des couches varie de 30 cm à 2,50 m ; le plus souvent, la veine principale a environ 2 m. Il y a parfois plusieurs couches séparées par des couches d'argile.

En 1843, d'Archiac soixante-quinze exploitations de lignite, dont neuf ne sont plus en exploitation. Cinquante d'entre elles sont exploitées à ciel
6. Annuaire de l'Aisne, 1813, p. 185-186.

7. Tribune de l'Aisne, 23 mars 1904, p. 185-186 ; Argus Soissonnais, 28 février 1904.

8. Bibl. mun. Laon, ms 557.
9. Baudemant, «Notes sur un manuscrit de l'abbé Poiret», Bulletin de la société académique de Laon, t. XXV.

ouvert : la couche de lignite étant très près de la surface, il est facile d'enlever les couches superficielles. C'est le cas le plus fréquent dans les vallées de la Marne, de l'Aisne et de l'Ailette. Huit sont exploitées en galeries horizontales sous les collines de l'Est du Laonnois. Dix-sept sont exploitées en puits et galeries, «à quelques mètres seulement au-dessous de la surface du sol», c'est le cas le plus général sur les deux rives de l'Oise de Rogécourt à Jussy, les puits pouvant atteindre 13 mètres. En ce qui concerne les mines souterraines, un rapport d'ingénieur de 183710décrit la technique. A partir des galeries principales, on divise le champ d'exploitation «en massifs de 15 mètres de côté que l'on recoupe dans les deux sens par des galeries à angle droit jusqu'à ce que l'épaisseur des piliers restants ne soit plus suffisante pour empêcher les éboulements. Alors on se retire en abandonnant le minerai qui reste et en enlevant le plus possible de cadres de boisage... la proportion de terres pyriteuses que l'on enlève par ce mode d'extraction varie de 50 à 75 % du tout». La géologie explique aussi les problèmes liées à l'eau retenue par l'argile. Il faut épuiser l'eau avec des treuils et des sceaux dans les puits ou organiser son évacuation dans les galeries horizontales des collines, l'étage des lignites correspondant à un important étage de sources dans ces collines. Enfin, nombre de cendrières à ciel ouvert sont maintenant des étangs.

6. Annuaire de l'Aisne, 1813, p. 185-186.

7. Tribune de l'Aisne, 23 mars 1904, p. 185-186 ; Argus Soissonnais, 28 février 1904.

8. Bibl. mun. Laon, ms 557.
9. Baudemant, «Notes sur un manuscrit de l'abbé Poiret», Bulletin de la société académique de Laon, t. XXV.


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Mauregny en Haye 423 hab. par JM Moltchanoff       

Les cahiers d'histoire de Mauregny ont été rédigés par Guy Pluchart et Jacques Tavola
Les auteurs ont parcouru les services d'archives et publient "Les cahiers d'histoire de Mauregny". 
> Une histoire très détaillée du village de la préhistoire au 19° siècle. 
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Un excellent travail ! Un des meilleurs sites de l'annuaire selon l'Annuaire des sites d'histoire des villages

par Gilbert Delbrayelle

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